Êtes-vous en bonne santé ?

Nous observons depuis quelques années un changement radical dans les types d’entrainement. Non seulement les exercices évoluent mais aussi leur durée, fréquence et intensité.

Dans les années 90-2000, il était fréquent de voir dans les salles de sport, des programmations d’entrainement (cardio-vasculaire essentiellement) où l’intensité ne devait pas dépassée 75% voire 80% de la FCM (Fréquence Cardiaque Maximale), où l’un des ennemis jurés était la production d’acide lactique (comme on aimait l’appeler à ce moment là. Il est plus juste de parler de production de lactates).

Pourtant, les recherches sur les effets du travail à haute intensité avaient commencé bien avant cela.

En 1996, Izumi Tabata a mis en évidence les différences entre l’entrainement à intensité modérée et l’entrainement à haute intensité.

Allons voir plus loin dans la recherche des effets de ce dernier type d’entraînement et comment les mettre en place dans les séances de type CrossFit/Cross Training ou Functional Training.

Croyances obsolètes

Les filières énergétiques (au cours de l’effort, l’organisme utilise de l’énergie à partir de 3 filières différentes et complémentaires) ont souvent dicté notre conduite sur la programmation d’entrainement, en pensant que chacune travaillait de manière indépendante, compartimentée.

Dans les années 90 (et malheureusement encore), nous avons longtemps pensé qu’il fallait au moins 45 minutes d’effort pour commencer à « brûler des graisses », universellement (cherchez l’erreur…)  La filière aérobie était largement plébiscitée.

Aujourd’hui, et avec les différentes recherches, nous savons que :

  • Les trois filières énergétiques (Anaérobie Alactique, Anaérobie Lactique, Aérobie) n’interviennent pas de manière segmentée.
  • Qu’il est nécessaire de travailler aussi bien les filières anaérobies qu’aérobie si nous souhaitons développer des qualités comme la force, la vitesse et la puissance.
  • L’entrainement fractionné à haute intensité développe aussi les capacités aérobies.
  • La production de lactate ne va pas à l’encontre des objectifs que l’on souhaite atteindre.

Le lactate, ami ou ennemi ?

Pour déterminer le potentiel d’une personne, la notion de seuil est souvent utilisée. On parle de seuil aérobie, seuil anaérobie ou encore de seuil lactique (exprimé en pourcentage de VO2max). Il est avéré que la mesure de la lactatémie (c’est à dire la mesure de l’évolution de la concentration sanguine de lactates) représente un excellent indicateur pour pouvoir évaluer ce seuil et donc le potentiel d’endurance de l’athlète.

Il existait une grande controverse entre cette notion d’augmentation de lactate sanguin et l’amélioration des performances aérobie d’un athlète.

Tout d’abord, la production de lactates intervient très rapidement, même lors d’un exercice à intensité modérée et elle croit ensuite, en fonction de l’augmentation de l’intensité. Sa concentration varie d’une personne à une autre, ce qui rend difficile les interprétations générales.

Ensuite, le niveau de lactate revient à un niveau quasi normal seulement après 1 à 2 heures après l’arrêt de l’exercice.

De plus, il n’est pas le déchet et encore moins cette toxine qui empoisonne le muscle, mais présente au contraire un fort potentiel énergétique…

Les recherches sur le travail à haute intensité

Les recherches ont commencé vers 1994 et se sont accentuées ces dernières années (notons que lorsqu’une recherche scientifique sort en parution, il faut souvent quelques années avant qu’elle soit établie et acceptée en tant que telle).

Tabata

Aujourd’hui, le nom de Tabata est utilisé pour décrire un entrainement standardisé à haute intensité (8 séries sur un exercice composé de 20 secondes de travail et 10 secondes de récupération).

Izumi Tabata et son équipe en 1996 ont réalisé une série d’expériences qui ont permis de démontrer que six semaines d’entrainement en endurance à moyenne intensité, n’affectaient pas les capacités anaérobies.  Par contre, les résultats ont confirmé que 6 semaines d’entrainement intermittent à haute intensité amélioraient non seulement les capacités anaérobies mais aussi le VO2max .

L’expérience consistait à proposer 6 semaines d’entrainement à raison de 5 séances par semaine sur vélo:

  • Pour un groupe : 60 minutes d’effort à intensité modéré à 70% de VO2max
  • Pour un autre groupe : 7 à 8 séries de 20 secondes de travail à 170% de VO2max (donc parfois bien loin des intensités que l’on peut retrouver dans certains entrainements), 10 secondes de récupération après chaque série.

Après cette période de test, les résultats ont montré que non seulement le travail à haute intensité intermittent apportait des réponses favorables significatives dans la filière anaérobie mais aussi dans la filière aérobie.

VO2max  a été amélioré de 5 ml/kg/min pour le premier groupe et 7 ml/kg/min pour le second groupe.

La capacité anaérobie pour le premier groupe n’a pas évolué de manière significative alors que pour le second groupe, elle a progressé de 28% !

Tremblay

L’étude a été faite en 1994 en comparant deux programmes d’entrainement. Le premier était un entrainement continu à moyenne intensité et l’autre était un entrainement en interval-training à haute intensité. Il s’est avéré que les personnes suivant le second programme obtenaient des pertes de poids de presque 9 fois supérieures aux personnes qui avaient suivi le protocole d’entrainement continu, et en un temps plus réduit (15 semaines contre 20 semaines pour le premier groupe).

Shepard

L’étude (dans un cadre moins scientifique) est plus récente (2015) et a été réalisée dans un cadre d’entrainement en situation réelle.

Deux groupes de participants volontaires, inactifs au niveau sportif, âgés de 42 ans.

  • Un groupe sur vélo, réalisant 5 séances par semaines de 30 à 45 minutes à une intensité de 70% de la FCM (Fréquence Cardiaque Maximale).
  • Un autre groupe sur vélo, réalisant 3 séances par semaine de 18 à 25 minutes composées de :
    • 15 à 90 secondes de sprint à une intensité supérieure à 90% de la FCM et
    • 45 à 120 secondes de récupération active.

Pour le second groupe, non seulement les variables physiologiques se sont nettement améliorées, mais les résultats ont aussi montré que la fréquentation aux séances d’entrainement des participants était de 83% pour le second programme contre 61% pour le premier.

Il existe d’autres études qui démontrent que le travail à haute intensité obtient de bien meilleurs résultats, à tous les niveaux, que les entrainements à basse ou moyenne intensité. Ce qui ne veut pas dire que ces derniers sont à proscrire.

Les séances à haute intensité au niveau psychologique

Il est intéressant de pouvoir analyser la réponse à l’entrainement à haute intensité au niveau mental.

Les études montrent que la réponse affective, c’est à dire « réflexe » ou instinctive concernant des exercices relativement court (<60 secondes), reçoivent un écho plus positif que les exercices continus à intensité modérée et nettement plus favorable que pour les entrainements continus d’intensité soutenue.

La notion de plaisir, qui suit la réponse affective, correspond à un sentiment d’acceptation et de satisfaction. Cette notion paraît être supérieure notamment pour les exercices intenses et plutôt courts que prolongés.

Bien que les réponses affectives positives et le plaisir perçu soient supérieurs pour les exercices à haute intensité, il existe peu de données qui montrent l’adhésion sur du long terme à ce type d’entrainement. Toutefois, les signaux laissent à penser à une certaine adhésion dans la durée (l’étude de Shépard vient renforcer cette hypothèse).

Comment intégrer les entrainements à haute intensité ?

D’un point vue scientifique, les différentes études ont montré que ce type d’entrainement fonctionne. Que cela soit au niveau de l’augmentation du VO2max, du seuil lactique ou de la capacité à résister à l’effort plus longtemps, les signaux physiques et psychologiques montrent qu’il est nécessaire de mettre de l’intensité dans les séances.

Depuis environ 5 ans, en France, nous voyons de plus en plus de séances d’entrainement avec de la haute intensité, ce qui était peu courant dans les salles de fitness auparavant.

Si l’intensité permet d’obtenir des résultats, comment l’intégrer dans les séances avec une pluralité de mouvement, pour un public hétérogène et en toute sécurité ?

Si une personne sédentaire, d’environ 40 ans et en surpoids, devait réaliser l’entrainement « Fran » (21, 15 et 9 répétitions enchainées de Thrusters à 43 kg pour les hommes et 29kg pour les femmes et de tractions), il y a peu de chance que cette personne finisse l’entrainement et que sa journée se passe merveilleusement bien. Idem pour un entrainement de type « Murph » (1,6km de course, 100 tractions, 200 pompes, 300 Squats et 1,6km de course). Combien de personnes ne peuvent plus bouger leurs bras pendant pratiquement une semaine ?

Le travail à haute intensité peut aussi aller à l’encontre des effets escomptés, s’il n’est pas adapté à chaque personne. Blessures, malaises, abandon de l’entrainement.

La gestion du travail à haute intensité s’apprend. Le coach doit veiller à la sécurité, à l’efficacité et au rendement du travail accompli.

Pour cela, la première étape serait d’aider le pratiquant à prendre conscience de son corps dans l’espace avec des mouvements qui ne lui semblent pas naturel.

Lorsque nous faisons faire un squat pour la première fois aux nouveaux pratiquants, combien ne se rendent pas compte que leurs talons se décollent du sol ou que leur dos s’arrondit ? Le coach doit se focaliser sur le travail technique en premier lieu. C’est essentiel non seulement pour la sécurité mais aussi pour la progression du pratiquant.

Une fois que la mécanique devient correcte, il faut apprendre aux pratiquants à l’intégrer dans un schéma de répétitions (plus ou moins long en fonction de l’exercice).

Par exemple, dans un format d’entrainement comme « Fran » (entrainement décrit plus haut), nous pourrions proposer une adaptation pour un néophyte en :

  • Réduisant les charges du thruster
  • Adaptant le mouvement des tractions par un départ du sol ou des tirages aux anneaux
  • Utilisant un disque ou haltères plutôt que la barre (qui peut occasionner un inconfort pour les personnes manquant de mobilité)
  • Séquençant le volume. Par exemple, proposer 5 séries de 9 répétitions plutôt que de suivre les 21, 15 et 9 répétitions. Prendre éventuellement entre 30 secondes et 1 minute de récupération après chaque série de thruster/traction.

Il existe encore d’autres méthodes pour pouvoir intégrer de manière correcte l’intensité dans les séances, et que chaque participant perçoive le côté positif de l’entrainement intense.

Une intensité maitrisée réside dans la capacité à pouvoir maintenir une certaine régularité technique dans l’enchainement des mouvements, d’exécuter les mouvements avec une bonne amplitude, une vitesse appropriée, et d’utiliser des charges adéquates. Tout cela sans déformation technique ou posturale des mouvements prescrits.

Tous les indicateurs semblent être au vert pour intégrer le travail à haute intensité dans les séances d’entrainement, et ce, de différentes manières.

Mais n’en oublions pas le principe de spécificité où chaque personne est unique, avec des objectifs, morphologies, contraintes différentes à considérer. La haute intensité oui, mais pas à n’importe quel prix.

Sources :

  • Tabata, 1996
  • Cazorla et coll., 2001

CrossFit Journal

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